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Synode et conséquences

Donc le Synode.

Autant vous dire que mes attentes étaient grandes.

Et que le Grand Patron est fort car il a réussi à les combler sans que Romain n'ait trop à ramasser ses dents (Romain est sympa, il incarnera pour cet article ceux qu'on appelle "les doctrinaires" et/ou "les tradis").

 

Donc j'ai lu avec attention le questionnaire envoyé aux évêques.

J'ai même proposé qu'on en discute dans notre groupe de couples.

Ce qui nous a valu une conversation intéressante.

 

Puis donc j'ai prié.

Parce que j'ai donc beaucoup d'attentes.

Et qu'en même temps, il faudrait un miracle pour que l'Eglise change vraiment de langage sur la famille.

 

La première semaine était intéressante.

Les articles de Radio Vatican faisaient état de débats intéressants. Mais on savait toujours pas où on allait.

 

Et puis donc la synthèse de travail le lundi.

Et juste L'EXTASE quoi.

TOUT TOUT TOUT ce qui me pose problème dans l'enseignement actuel de l'Eglise est écrit dedans.

Des fiancés qui n'arrivent pas vierges au mariage aux divorcés remariés interdits de communion mais qui peuvent soudainement communier si leur ancien conjoint meurt subitement (absurde).

En passant par les homosexuels.

Je me suis répétée longuement dans mes prières ces phrase si banales et si extraordinaires à la fois :

Les personnes homosexuelles ont des dons et des qualités à apporter à l'Eglise. Demandons-nous si nous leur faisons un accueil vraiment fraternel.

 

Tout mon combat de ces 15 dernières années est là.

Dans l'accueil fraternel.

Car quand j'ai commencé à lire les forums de la Conférence des Eveques de France il y a 15 ans, je suis tombée des nues en découvrant que pour l'Eglise, les homosexuels étaient des personnes malades qu'il fallait soigner.

J'ai vécu au lycée dans un groupe de copains où il n'y avait que deux garçons. Tous les deux ont réalisé qu'ils étaient homosexuels et ont commencé à l'assumer pendant cette période.

Assister à cela a été une expérience vraiment très importante pour moi.

Parce que j'ai eu ces deux amis, chacun homosexuel d'une manière très différente, je sais que ce ne sont pas des personnes malades. Je sais qu'ils sont nés ainsi. Et que découvrir leur nature a été une libération et un épanouissement. Que ça n'a été facile pour aucun des deux. Et que ce n'était sûrement pas une perversion.

Je ne sais pas si un jour l'Eglise acceptera le sacrement de mariage entre deux personnes homosexuelles. Je ne vois personnellement RIEN qui s'y oppose.

Mais ce n'était même pas ça que j'attendais du Synode (je pense qu'il faudra du temps encore). Mais cette reconnaissance de la valeur des personnes homosexuelles.

 

Beaucoup d'autres choses m'ont parlé.

L'idée de "voir les choses positives" dans les situations bancales, notamment le "concubinage parfois subi plutôt que choisi". (si je savais qui a dit ça, j'irai lui faire un gros câlin).

Le parcours que nous avons fait avec Johm est pour moi un témoignage important. Nous étions dans une impasse entre nos besoins psychologiques, nos possibilités économiques et cet idéal de la virginité avant le mariage. Il y a une blessure chez moi, une blessure que je ne peux pas confesser car à mes yeux elle n'est pas un péché. Le Grand Patron a fait que notre choix de ne pas rester vierges est devenu public par la naissance de l'Héritier. Nous entendons encore des reproches dans les repas dans ma famille à cause de ce choix. Romain a appelé la naissance de mon fils "une erreur de parcours" et je ne peux pas accepter ça. J'ai l'impression d'avoir toujours suivi la voie du Grand Patron. Evidemment nous sommes sortis des jolies petites cases de l'Eglise (des jolies petites cases dont les limites ont été fixées au 19ème siècle dans des familles bourgeoises cela dit en passant). J'ai envie de dire tant pis pour elle. Nous ne considérons pas moins méritants de l'amour du Grand Patron et du Salut. Cette idée "de choses positives" correspond exactement à ce sentiment. Sans dire "abandonnez la virginité", elle permet juste aux couples comme nous de se sentir acceptés. Et accueillis. Je suis très reconnaissante aux pères synodaux qui l'ont formulée.

 

Puis donc les groupes de travail ont remis la synthèse sur l'ouvrage.

Je n'ai pas encore trouvé le texte final accessible en français.

Mais d'après les analyses, toutes ces paroles qui m'avaient touchées ont disparu.

ZUT.

J'ai cependant apprécié (pour une fois) la conclusion d'un non-catholique, Daniel Schneidermann. Qui dans sa chronique a rappelé que le temps de l'Eglise n'est pas le même que le temps médiatique. Et que cette synthèse le rappelle à tous.

Les choses vont changer. Mais lentement.

 

Mais déjà vu ce qui a été dit publiquement dans cette synthèse de travail, les choses sont en mouvement. Certaines personnes au Vatican nous comprennent. Alleluia.

 

**********

Il se trouve que la semaine avant le Synode, je suis montée à Paris pour aller voir un spectacle avec Mushroom.

Nous nous sommes retrouvés à midi et nous avons passé la journée ensemble à discuter de nos vies.

Ca faisait je pense vraiment longtemps que nous n'avions pas pris le temps de le faire.

 

Après le spectacle, Mushroom m'a proposé de rejoindre des amis à lui dans un délicieux restaurant chinois végétarien.

Il m'a prévenue qu'il y avait deux personnes transexuelles et que je devrais faire attention à ma façon de m'adresser à eux (pas de pression, super).

Il y avait un garçon avec des organes génitaux de fille et une fille avec des organes génitaux de garçon. Ils ne subiront pas d'opération et s'habillent de manière androgyne.

Parfait pour rendre impossible toute utilisation des pronoms "il" et "elle".

C'était une très bonne soirée même si je me suis posée au moins un milliard de questions.

 

Jo, le garçon aux organes génitaux de fille, nous a raconté "une histoire" (je reprends ses mots) qu'il a vécue avec un garçon homosexuel (avec des organes génitaux de garçon - je crois qu'on dit cisgenre). Garçon qui aurait à présent des vues sur Mushroom.

J'ai donc passé toute la soirée à me demander comment ça se passe. Quand tu es un garçon cisgenre homosexuel, que tu flashes sur quelqu'un que tu considères donc comme un garçon mais qu'une fois au lit, SURPRISE en fait non.

Tout ça m'a l'air très compliqué. A moins que tu sois bi et que du coup tu te fiches de ce que tu vas trouver sous les draps.

 

Chloé, la fille aux organes génitaux de garçon, m'a encore plus mystifiée.

Déjà parce qu'elle ne portait pas un maquillage de fille (ce que je mets quand je veux "passer pour une fille" personnellement). Du noir autour des yeux et basta. Plutôt punk quoi.

Puis surtout parce que c'était le sosie de Mercutio, un de mes copains du lycée.

MAIS GENRE LES MEMES MIMIQUES. LE MEME TYPE DE FRINGUES. LA MEME VOIX AVEC LES MEMES INTONATIONS.

Du coup j'ai soudainement réalisé que Mercutio n'était pas seulement homosexuel. Il est sûrement transexuel. Sauf que nous ne le savions pas à l'époque, ni lui, ni nous.

J'ai repensé à toutes ces soirées où les invités se moquaient de ses fringues et de ses manières "de fille". Au fait qu'il portait mieux les collants et les talons que moi.

J'espère très fort qu'il le sait maintenant et qu'il est ENFIN bien dans sa peau (je n'ai plus aucun contact avec lui).

 

J'ai donc trouvé très drôle cette soirée avec deux homosexuels cisgenres, deux transexuels et moi la petite catho cisgenre mariée avec un enfant.

En sachant que le lendemain matin 10h j'avais un rendez-vous pour l'aumônerie.

Des fois, c'est vraiment marrant d'être moi.

 

(le resto était très bon, Pamela je te le conseille)(je vais y emmener Johm).

 

**********

Là-dessus, donc le Synode se termine.

Repas de famille dimanche dernier.

J'arrive à la bourre, après ma réunion merveilleusement merveilleuse.

Et là ma tante m'accueille en me disant qu'elle n'ira plus jamais sur Facebook car ce que j'y ai dit sur le Synode l'a choqué.

 

Ah ?

 

Oui parce que donc voyez-vous, l'Eglise se perd complètement, bientôt elle va accepter le mariage pour les homosexuels et c'est hors de question.

Et qu'est-ce que c'est que cette histoire de "choses positives" dans le concubinage, c'est une honte.

Evidemment c'est moi qui me prend tout dans la poire alors que, dois-je le préciser, toutes mes cousines ont vécu avec leur mec avant le mariage et avaient des rapports sexuels avec contraception. Mais moi évidemment, ça se voit, alors c'est sur moi que ça tombe.

J'essaye de lui expliquer mais je parle un peu dans le vide.

Ma mère embraye sur "l'horrible curé qui dit qu'on a pas le droit de communier si on utilise des contraceptifs" (et voilà comment on parla un jour de Romain dans un repas de famille)(ça, c'est fait).

Ma tante, qui a utilisé des contraceptifs dans sa vie, embraye sur c'est une honte de dire aux jeunes d'en utiliser avant le mariage.

Ma cousine qui s'est fait ligaturé les trompes (notons que elle personne ne le lui jette à la figure en repas de famille) me regarde avec horreur en me demandant si je dis aux jeunes de l'aumônerie de ne pas utiliser de contraceptifs.

 

Comme on ne s'est pas encore assez disputé, ma tante embraye sur "le scandale des homosexuels".

Je récite le texte de la synthèse de travail du lundi. Les dons, les qualités, l'accueil fraternel. Je lui fait remarquer qu'il n'y a pas de reconnaissance d'un quelconque "mariage gay".

Ah oui, très bien, très bien, répond ma tante, les dons et les qualités, franchement c'était pas la peine de convoquer un synode pour ça. Et puis on les accueille très bien, vraiment a-t-on déjà entendu parler d'une église où ils auraient été mal accueillis, vraiment c'est de l'exagération.

Je n'ai pas même pas le temps de répondre, elle continue toute seule.

Mais bon quand même, les accueillir, d'accord, mais quand même les homosexuels, ils sont anormaux. OUI ILS SONT ANORMAUX.

- Ah ben voilà, merci Tata d'avoir mieux éclairci cette question, ton exemple est parfait.

 

Ses filles n'étaient plus à table, son gendre faisait genre qu'il se passait un truc hyper important sur son téléphone. J'étais TOUTE SEULE.

Ma mère me faisait des gros yeux genre c'est par moi que le scandale est arrivé.

Ma tante s'est enlisée dans une grande tirade sur "ces hommes pervers qui se tripotent" que mon frère a coupé en lui disant "ah ben s'ils le font dans l'église, c'est sûr qu'on risque pas de les y accueillir".

J'ai donc juste rajouté que "j'étais désolée qu'elle vive mal le fait que je pense que les homosexuels sont des personnes normales".

 

Elle a continué toute seule pendant une bonne vingtaine de minutes.

On est passé par les intégristes, qui les pauvres ont bien le droit de vouloir prier en latin (là je l'ai un peu calmée en lui rappelant que maintenant ils ont le droit mais qu'ils n'ont quand même pas voulu revenir donc qu'il devait y avoir autre chose).

On est revenu sur la contraception, où tout le monde autour de la table s'est mis à regarder ses pieds. Sauf moi. Et ma mère qui me faisait les gros yeux en me disant "chut chut tais-toi".

Je me suis pris un reproche dans la gueule pour avoir enfanté avant le mariage.

 

Et puis le clou du spectacle.

 

"Ah ben ils ont qu'à jeter aux orties tous les principes et autoriser n'importe quoi, mais je te préviens, si un jour ils disent que l'avortement c'est bien, moi je quitte l'Eglise".

 

Silence de mort à table.

J'ai répondu que ça n'arrivera jamais. Très calmement.

Il faut savoir que ma tante, si respectueuse de l'enseignement de l'Eglise et de la morale, a emmené un jour sa fille, alors âgée de 19 ans, se faire avorter.

J'ai remercié intérieurement le Grand Patron que ma cousine ait eu un empêchement et ait raté cette (horrible) tirade.

 

JE NE COMPRENDS PAS.

Je crois que ma tante est complètement folle.

Je ne vois pas d'autre explication.

 

 



28/10/2014
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