absolution

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La question

J'avais un défi depuis ces 4 mois d'analyse.

Le dire à ma mère.

Et lui poser une question précise (qui n'est pas le genre de question que tu poses lors d'un déjeuner dominical à moins de mettre tout le monde mal à l'aise)(cela dit j'aurais pu tenter).

 

Mais je n'y arrivais pas.

A chaque fois que je la vois, je me dis "allez maintenant je lui dis". Et puis ça sort pas.

Au début, je savais pas comment lui dire POURQUOI j'avais commencé une analyse. Je ne voulais pas ouvrir la boîte de Pandore "tu vois il y a ce merdier avec le curé".

Maintenant que le merdier est dissipé (même si je continue à me méfier de l'eau qui dort), ça me semblait plus facile mais quand même.

 

Puis y'avait la question.

Car très rapidement, au bout de la deuxième ou la troisième séance, m'est apparu une évidence.

Le vocabulaire que j'utilise pour parler de mes relations avec ces hommes-là est celui des victimes d'agression sexuelle.

Je me sens comme une proie face à un prédateur et je panique.

(c'est assez drôle de remettre cette phrase dans son contexte quand on connaît le gabarit et le charisme d'huitre de Romain qui n'est pas même pas capable de faire du mal à une limace)

J'ai cherché, cherché, cherché et non aucun souvenir d'une quelconque agression sexuelle originelle. Enfin si il y en a une mais elle s'est produite tard (c'était un mois avant que je rencontre Johm) et je pense qu'elle a juste réveillée mes peurs qui étaient déjà bien ancrées. Je crois qu'elle est quand même bien plus importante que ce que je voulais le croire car mes symptômes lorsque j'ai recroisé mon agresseur trois ans plus tard sont EXACTEMENT les mêmes que lorsque je panique en présence de Romain.

Et puis je me suis rappelée. D'un truc que ma mère répète tout le temps. De ne jamais faire confiance aux hommes, aucun, car ils peuvent céder à une pulsion, comme un chien qui devient fou et attaque quoi. Et de fait, mon père est le seul homme en la présence duquel elle m'a laissée seule.

C'était un point de départ. Pour la question.

 

D'où vient cette idée ? Qui te l'a transmise ? Quelqu'une a-t-elle été agressée dans cette famille et le souvenir et la peur se transmet de générations en générations ? Toi ? Ta mère ? Encore avant ?

 

 

Et puis donc lundi soir, il y avait encore de la famille (Lisbeth a baptisé son creveteau dimanche) donc je suis allée manger chez elle. Johm ne voulait pas venir. Je me suis donc retrouvée seule dans la cuisine avec ma mère pendant que l'Héritier regardait la télévision dans la pièce à côté.

Allez zou c'est TA chance là.

Et puis non, ça ne venait toujours pas.

Puis ma mère m'a annoncé qu'un cas d'autisme asperger avait été détecté dans la famille, c'est le troisième cousin de sexe mâle qui est malade. Ca commence à faire beaucoup. C'est ce qu'a dit ma mère.

 

- C'est bizarre quand même toutes ces maladies psychologiques dans cette famille.

- Ouaip, lui ais-je répondu.

- Et encore il n'y a donc que trois cas "officiels" mais peut-être qu'il y d'autres souffrances... tu sais je me fais du souci pour toi, parfois tu es vraiment psychorigide et...

 

Et là j'ai vu la brèche et je m'y suis engouffrée.

 

- Oh mais tu sais Maman, j'ai remarqué aussi, et c'est pour ça que je vois une psy depuis quelques mois.

 

Elle était contente je crois. En plus on a subtilement évité la boîte de Pandore et ça c'était quand même VRAIMENT COOL.

Et j'ai donc posé ma question.

 

Personne n'a été agressée. MAIS il y a bien eu transmission de "la peur d'être violée qui serait pire que la mort" de sa mère à elle. Elle m'a répété son motto sur les hommes chiens fous. En trouvant ça parfaitement normal.

Et puis spontanément elle m'a raconté ça. Je ne sais pas trop encore quoi en faire mais je le laisse là.

 

Tu sais, pendant "les événements", un jour des fellaghas sont entrés armés chez nous. Ton grand-père était au travail, il n'y avait plus école, on était donc seules avec ma mère. Elle a eu très peur qu'ils nous violent. Alors elle s'est interposée en leur disant qu'ils n'avaient rien à faire chez elle, qu'elle ne les laisserait pas visiter la maison et qu'ils devraient la tuer avant. Ils sont repartis.

Ensuite tout le monde, les voisins, la famille, lui ont dit qu'elle avait été très courageuse. Elle disait que non, qu'elle n'avait pas eu le choix car elle aurait préféré mourir plutôt que de vivre avec l'idée qu'elle avait laissée ses filles se faire violer.

 



04/06/2014
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