La délicieuse bûche à la brique romaine
Dimanche, nous étions censés avoir une réunion d'aumônerie.
Au final on a été les seuls à se pointer, donc on a mangé en tête à tête avec Pierre.
Je savais qu'on allait parler de Romain. Pierre ADORE me parler de lui.
J'avoue que je ne m'attendais pas à la cargaison de briques qui m'est tombée sur la tête.
Au dessert, on y a pas loupé.
- Et alors Romain ne souffre pas trop de devoir travailler avec les autres intégristes ?
HEIN QUE DE QUOI ???
Mais enfin Pierre c'est toi qui m'a dit et répété qu'il était de l'Opus Dei et maintenant tu sous-entends le contraire ?
- Non parce que c'est un type relativement intelligent (HEIN QUE DE QUOI ???) mais très feignant (ah oui ça, j'avais bien remarqué). C'est vraiment dommage que je ne travaille plus avec lui, on aurait pu faire du bon travail (HEIN QUE DE QUOI ???).
Et alors le truc qui m'a achevée :
- Tu sais je crois qu'il t'a dit la vérité pour Halette, il ne pouvait pas savoir. Il y a eu un autel face au peuple, très moche en fer forgé, je peux te le jurer, j'ai moi-même célébré dessus dans les années 1980.
HEIN QUE DE QUOI ???
(c'est d'ailleurs là que j'ai appris que Pierre s'était fighté avec mon ancien directeur de recherches au sujet des vitraux)(mais ça c'était beaucoup plus marrant comme information)
- Il t'a parlé de sa soeur qui est super progressiste ?
JE HEIN QUE DE QUOI PARDON BON TIREZ MOI UNE BALLE DANS LA TETE CA IRA PLUS VITE.
Je n'ai jamais mangé une bûche glacée avec un goût aussi amer.
MAIS QUI EST CE TYPE EN VERITE ???
A qui ment-il entre Pierre et moi ?
Est-ce que c'est juste un ectoplasme qui change d'avis en fonction des gens ?
Pourquoi tout le monde ressent le besoin de me parler tout le temps de lui ???
Je ne sais plus qui sont les gentils et les méchants dans cette histoire, qui est intégriste et qui ne l'est pas, je suis complètement déboussolée.
J'ai une boule au ventre qui grossit au fur et à mesure que les minutes me rapprochent de mardi soir, où nous sommes censés nous voir et où il faut par honnêteté que je dise devant tout le monde que son homélie des Cendres m'a beaucoup touchée (le dire à mon assiette, le dire à mon assiette, le dire à mon assiette, surtout ne pas croiser son regard). Je formule des milliers de phrases depuis trois jours, j'ai l'impression qu'elles crient toutes à la face du monde ce qu'il est hors de question que j'avoue à quiconque jamais.
Je crois que je n'aurais pas la force de le dire et que je vais aller m'en excuser auprès du Grand Patron.
Des fois, c'est vraiment épuisant d'être moi.